11 September 1789: Necker’s letter, sanction, & the voting procedure

À l’ouverture de la séance, le président (c’est toujours le comte de Clermont) a lu une lettre par laquelle M. Necker demandait qu’on fît la lecture du rapport qu’il a fait hier au Conseil sur les questions qui occupent aujourd’hui l’Assemblée. Les motifs de cette démarche sont évidents. M. Necker a prononcé dans des conversations particulières et très publiquement son opinion sur le veto ; il le désirait absolu ou indéfini, et certes il n’était pas le seul. Il a craint qu’on ne lui fît un crime de cette opinion, et il a voulu l’expliquer.

(…) Il est arrivé ce qui devait être naturellement ; après une discussion fort longue et très chaude, dans laquelle les amis de M. Necker ont encore eu la maladresse de demander trop d’instance qu’on lût son mémoire, il a été arrêté qu’il ne serait pas lu.

On a passé ensuite à la discussion de la sanction royale. C’est une chose très affligeante pour les bons citoyens que le défaut de lumières d’un grand nombre des membres de l’Assemblée, plusieurs confondaient la sanction avec le veto. (…)

Un ancien décret ordonnait qu’on irait aux voix par appel nominatif… Le président ayant eu la maladresse de vouloir consulter le voeu de l’Assemblée pour savoir si elle ne voulait pas revenir sur cette décision, la majorité avait été d’avis de juger par assis et levé. La minorité a fait les réclamations les plus violentes contre l’indécence d’un tel mode de délibération, qui tient toujours de l’acclamation, qui présente quelque incertitude, etc., etc. La majorité, après la résistance la plus forte et la plus longue, a consenti, sur les observations du duc de Liancourt, à revenir sur ce décret. (…)

Journal d’Adrien Duquesnoy, député du Tiers état de Bar-le-Duc, sur l’Assemblée constituante : 3 mai 1789-3 avril 1790, t. 1 (Paris, 1894), p. 328.

21 January 1790: “…one has to be the strongest or to shut up” – a deputy on the Assembly’s mechanics

La séance de ce matin a donné… lieu à deux observations importantes : on a lu la liste des personnes qui composent le comité d’imposition : je ne les crois pas bien choisies, et, à la réserve de M. Dupont, je ne sais s’il y a d’autre personnes qui méritent la confiance publique. L’évêque d’Autun, M. de Laborde, etc., etc., sont des agioteurs connus pour tels et très peu versés dans la théorie de l’imposition. De grands réclamations se sont élevées à cette lecture ; on s’est plain de ce que les mêmes personnes composent tous les comités. On a rappelé un article du règlement qui veut que la même personne ne puisse être membre de plusieurs comités à la fois. On a fait de grands clameurs, on a crié contre les listes arrêtées aux Jacobins, etc., etc. Je sais bien tout ce qu’on peut opposer à la manière dont se font presque tous les choix : il n’est qu’un moyen certain d’être choisi, c’est de le vouloir, c’est de quêter des suffrages ; du reste, il n’y aura jamais que l’homme antérieurement connu pour de grands talents, ou celui qui a voulu marquer dans l’Assemblée, qui puisse sans intrigue… être choisi pour entrer dans un comité. Mais l’homme qui dédaigne l’intrigue, qui, content de voter à son tour sur les questions soumises à la délibération, ne cherche pas à briller pour briller, l’homme qui se tait parce qu’il est assuré qu’un autre dira mieux que lui ce qu’il voulait dire, celui-là ne sera jamais élu et ne doit pas l’être : cela n’est pas dans le cours des événements ordinaires. Il est donc naturel, il est nécessaire que les mêmes personnes composent tous les comités. Si l’on ajoute à cela que la confiance doit être libre, qu’il n’y a aucune raison (sic) et que personne n’a le droit de m’empêcher de donner une voix à telle ou telle personne, que, si je crois que telle ou telle personne est la plus propre à préparer le travail dans tel ou tel comité, il faut que je lui donne ma voix… (…) Il est fort remarquable, au reste, que ces plaintes venaient surtout de 10 ou 12 personnes portées toujours par leur parti à tous les comités et désespérés de l’être toujours inutilement : l’amour-propre humilié s’irrite. Mais pourquoi ne savent-ils penser comme la majorité ? et ceux qui font ces plaintes croient-ils en bonne foi qu’ils seraient élus quand même on ne permettrait à un membre de l’Assemblée d’être que d’un comité ? (…) Dans toute espèce d’assemblée, il faut être le plus fort ou se taire.

Journal d’Adrien Duquesnoy, député du Tiers état de Bar-le-Duc, sur l’Assemblée constituante : 3 mai 1789-3 avril 1790, t. 2 (Paris, 1894), p. 299-300.